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Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes examine le rapport de la Suisse

Rapport de la Suisse

02 novembre 2016

GENEVE (2 novembre 2016) - Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a examiné, aujourd'hui, le rapport périodique de la Suisse sur les mesures prises par ce pays pour donner effet aux dispositions de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. 

Présentant ce rapport, Mme Sylvie Durrer, Directrice du Bureau fédéral de l'égalité entre femmes et hommes au Département fédéral de l'intérieur de la Suisse, a rappelé que son pays était «une jeune démocratie» où les femmes n'ont le droit de vote (au niveau fédéral) que depuis 1971.  Soulignant, à l'instar de Simone de Beauvoir, que les libertés civiques ne suffisent pas à l'émancipation féminine si elles ne s'accompagnent pas d'une autonomie économique, elle a reconnu que cette autonomie était encore incomplète.  «La Suisse s'engage résolument sur la voie de l'égalité», a-t-elle toutefois indiqué.  L'an dernier, le Bureau fédéral de l'égalité a publié un guide permettant aux offices fédéraux de procéder à une analyse prospective visant à terminer les conséquences de tout projet d'acte législatif du point de vue de l'égalité des sexes, a-t-elle ajouté. 

Les dernières statistiques recensent une augmentation des plaintes déposées pour discrimination sur leur lieu de travail par des mères et des femmes enceintes; il est toutefois impossible de savoir si c'est le signe d'une meilleure sensibilisation et d'une meilleure disposition des femmes à défendre leurs droits ou si les situations de discrimination ont effectivement augmenté, a fait observer Mme Durrer.  Cette interrogation vaut également pour les violences familiales, alors que le nombre de délits pénaux enregistrés par la police est resté globalement stable depuis sept ans.  Il est probable qu'une votation nationale aura lieu dans l'avenir pour demander à la population de se prononcer sur l'interdiction du voile intégral; «Quelle qu'en soit l'issue, le Gouvernement suisse veillera à ce que les femmes musulmanes ne soient pas discriminées en raison de leur pratique religieuse», a d'autre part assuré Mme Durrer.  Elle a ensuite évoqué les mesures prises en faveur de l'amélioration de l'égalité dans la vie professionnelle; en faveur du renforcement de la lutte contre la violence envers les femmes et contre la violence domestique; et en faveur de la modernisation du droit de la famille.  Le Gouvernement vient de décider d'obliger les entreprises de plus de cinquante salariés à procéder à une analyse de l'égalité salariale tous les quatre ans, a-t-elle notamment fait valoir.  Mme Durrer a par ailleurs reconnu que l'autorégulation n'avait pas permis d'aboutir à une représentation équilibrée des hommes et des femmes au sein des fonctions dirigeantes. 

L'imposante délégation suisse était également composée, entre autres, de hauts fonctionnaires des départements fédéraux de l'intérieur, de la justice et de la police, des affaires étrangères, des finances, ainsi que de l'économie, de la formation et de la recherche.  Elle comprenait aussi une représentante du canton de Berne.

La délégation a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité en ce qui concerne, notamment, l'applicabilité directe de la Convention; l'approche de la Suisse s'agissant des mesures temporaires spéciales; les femmes migrantes; les pratiques traditionnelles néfastes; les stéréotypes sexistes; les écarts de salaires entre hommes et femmes; les femmes handicapées; ou encore la lutte contre la pauvreté.

Au cours du dialogue, une experte a fait observer que le principe d'égalité et de non-discrimination était reconnu en Suisse de manière minimale par rapport à l'article premier de la Convention.  Une experte s'est inquiétée de la situation des résidentes illégales victimes de la traite et menacées d'expulsion si elles ne collaborent pas avec la police.  L'attention a en outre été attirée sur les disparités en matière d'accès à la santé entre les Suissesses et les migrantes.

Pour quelles raisons les femmes continuent-elles d'être sous-représentées dans les organes dirigeants du pays, leur représentation au sein du Gouvernement dépassant à peine les 28%, a-t-il par ailleurs été demandé?  Une experte a constaté que les choix de formation et de carrière restaient stéréotypés en fonction du sexe, ce qui explique au moins en partie les écarts salariaux subsistant entre les deux sexes. 

Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport de la Suisse et les rendra publiques à l'issue de la session, qui doit clore ses travaux le vendredi 18 novembre prochain.

Demain matin, à 10 heures, le Comité entamera l'examen du rapport du Honduras.

Présentation du rapport de la Suisse

Le Comité est saisi du rapport périodique de la Suisse, ainsi que des réponses du pays à la liste de points à traiter que lui a adressée le Comité.

MME SYLVIE DURRER, Directrice du Bureau fédéral de l'égalité entre femmes et hommes au Département fédéral de l'intérieur de la Suisse, a rappelé que son pays était «une jeune démocratie» où les femmes n'ont le droit de vote (au niveau fédéral) que depuis 1971.  Soulignant, à l'instar de Simone de Beauvoir, que les libertés civiques ne suffisent pas à l'émancipation féminine si elles ne s'accompagnent pas d'une autonomie économique, elle a reconnu que cette autonomie était encore incomplète.  «La Suisse s'engage résolument sur la voie de l'égalité», a-t-elle toutefois indiqué; en témoigne l'intégration par le Gouvernement fédéral d'une ligne directrice concernant l'égalité entre les femmes et les hommes dans son programme de législature 2016-2019, ainsi que dans sa Stratégie pour le développement durable pour la même période.  Le Plan d'action 2010-2014 a servi à mettre en œuvre les recommandations du Comité et à sensibiliser les offices fédéraux aux engagements du pays, a en outre souligné Mme Durrer.  L'an dernier, le Bureau fédéral de l'égalité a publié un guide permettant aux offices fédéraux de procéder à une analyse prospective visant à déterminer les conséquences de tout projet d'acte législatif du point de vue de l'égalité des sexes, a-t-elle ajouté. 

Les autorités de conciliation sont les plus en prises avec les questions de discrimination dans les rapports de travail, a poursuivi Mme Durrer.  Leurs dernières statistiques recensent une augmentation des plaintes déposées pour discrimination sur leur lieu de travail par des mères et des femmes enceintes.  Il est toutefois impossible de savoir si c'est le signe d'une meilleure sensibilisation et d'une meilleure disposition des femmes à défendre leurs droits ou si les situations de discrimination ont effectivement augmenté, a fait observer la Directrice du Bureau fédéral de l'égalité entre femmes et hommes.

Mme Durrer a ensuite annoncé que le phénomène du «harcèlement obsessionnel» ferait l'objet l'an prochain d'une étude de la part de son Bureau.  En politique, les élections fédérales de 2015 ont enregistré un recul du nombre de femmes élues au Conseil des États mais une légère augmentation de leur proportion au Conseil national, a d'autre part indiqué la cheffe de délégation.  «Si les médias ne cèdent presque plus aux stéréotypes de genre, ce qui est à saluer, les candidates demeurent toutefois nettement sous-représentées dans les textes comme dans les images», a-t-elle observé.

Si l'intégration de la communauté musulmane est globalement bonne, a poursuivi Mme Durrer, «malheureusement, la récente crise migratoire et les attaques terroristes se réclamant de l'islam ont entamé la confiance générale envers cette population».  «Ce sentiment de défiance s'exprime actuellement dans le débat sur le voile intégral», a-t-elle expliqué.  Or, les personnes dissimulant leur visage pour des raisons religieuses sont, pour la plupart, des touristes de passage, ce qui explique que le phénomène soit limité.  À diverses reprises, le Gouvernement s'est exprimé contre l'interdiction du voile intégral, une appréciation de la situation qui n'est pas partagée par tous les cantons, au Tessin en particulier, a-t-elle reconnu, rappelant que les cantons sont libres de légiférer en la matière.  Il est probable qu'une votation nationale aura lieu dans l'avenir pour demander à la population de se prononcer sur l'interdiction du voile intégral.  «Quelle qu'en soit l'issue, le Gouvernement suisse veillera à ce que les femmes musulmanes ne soient pas discriminées en raison de leur pratique religieuse», a assuré Mme Durrer.

Mme Durrer a ensuite évoqué en détail les mesures prises en faveur de l'amélioration de l'égalité dans la vie professionnelle; en faveur du renforcement de la lutte contre la violence envers les femmes et contre la violence domestique; et en faveur de la modernisation du droit de la famille.  S'agissant des écarts salariaux entre hommes et femmes, elle a relevé que nombre d'entreprises n'ont en fait jamais procédé à une véritable analyse de la situation.  Depuis cette année, toute entreprise qui soumissionne pour un marché public dont la valeur se situe au-dessus du seuil de l'Organisation mondiale du commerce doit apporter la preuve de son respect de l'égalité salariale.  Le Gouvernement vient de décider d'obliger les entreprises de plus de cinquante salariés à procéder à une analyse de l'égalité salariale tous les quatre ans, a ajouté la cheffe de délégation. 

Mme Durrer a par ailleurs reconnu que l'autorégulation n'avait pas permis d'aboutir à une représentation équilibrée des hommes et des femmes au sein des fonctions dirigeantes.  La proportion de femmes dans les conseils d'administration des cent plus grandes sociétés suisses est passée de 13% en 2014 à 16% cette année; «pire encore, au sein des directions, les chiffres sont bloqués à 6% des femmes depuis 2013», a-t-elle fait observer.  Le Gouvernement suisse a mis en discussion un projet de révision du droit de la société anonyme fixant des valeurs seuils pour la représentation des sexes dans les fonctions dirigeantes des sociétés cotées en bourse, à savoir au moins 30% de femmes dans les conseils d'administration et 20% au sein de la direction, le Gouvernement ayant décidé de montrer l'exemple.

Par ailleurs, le Gouvernement a pris un train de mesures dont plusieurs visent spécifiquement la conciliation entre vie professionnelle et vie privée.  Des mesures ont été prises afin d'améliorer l'autonomie financière des femmes.  Des statistiques récentes montrent que les retraites des femmes sont, en moyenne, plus basses de 37% que celles des hommes.  Le projet de réforme de la prévoyance vieillesse actuellement discuté par le Parlement comporte des mesures améliorant l'accès à la prévoyance professionnelle qui bénéficieront notamment aux femmes, a précisé Mme Durrer. 

S'agissant des violences contre les femmes, depuis sept ans, le nombre de délits pénaux enregistrés par la police est resté globalement stable, a d'autre part indiqué Mme Durrer, précisant que plus de 17 000 délits pénaux de violence domestique avaient été répertoriés l'an dernier.  Mme Durrer a souligné qu'il était difficile d'expliquer l'absence de baisse significative: est-ce le résultat du travail de sensibilisation qui entraîne une hausse des dépôts de plaintes ou est-ce que la violence domestique ne baisse effectivement pas?  Elle a émis l'espoir que son pays ratifierait d'ici 2018 la Convention d'Istanbul relative à la violence domestique.  Dans cette perspective, une cinquantaine de mesures sont en cours dans la lutte contre la violence faites aux femmes et un projet de loi fédérale sur l'amélioration de la protection des victimes sera soumis au Parlement au premier semestre de l'an prochain, a-t-elle indiqué. 

Contre les pratiques traditionnelles préjudiciables, le Gouvernement suisse a débloqué cette année un budget annuel de 300 000 francs pour financer les activités d'un réseau contre les mutilations génitales féminines, sous le pilotage de plusieurs ONG, a par ailleurs fait valoir Mme Durrer. 

En matière de lutte contre la traite et contre l'exploitation sexuelle, le Gouvernement estime qu'une interdiction de la prostitution ne règlerait pas le problème, a-t-elle poursuivi.  Les objectifs à atteindre sont d'améliorer l'accès des prostituées aux soins de santé et de renforcer leur protection par de nouvelles mesures législatives, a-t-elle expliqué.  Est ainsi envisagée une révision de la loi sur les étrangers afin de favoriser le maintien du séjour pour les personnes victimes d'infractions à l'occasion d'une activité de prostitution.

Enfin, les modifications législatives dans le domaine du droit de la famille consolident l'égalité entre les sexes, a expliqué Mme Durrer qui a cité, entre autres dispositions, le nouveau droit du divorce instaurant le principe de l'autorité parentale conjointe.  Elle a aussi indiqué que le Parlement avait accepté la possibilité d'adoption de l'enfant du partenaire au sein des couples homosexuels.

Sur le plan international, en matière de coopération au développement, la Suisse a augmenté sa contribution en faveur de l'Entité des Nations Unies pour l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes (ONU-Femmes) à hauteur d'une cinquantaine de millions de dollars pour la période 2015-2017 et soutient l'ouverture de son bureau de liaison à Genève.  

Questions et observations des membres du Comité

Une experte a rappelé que le Comité avait demandé à plusieurs reprises à la Suisse de lever toute réserve à la Convention, aussi minime soit-elle.  Par ailleurs, le principe d'égalité et de non-discrimination est reconnu de manière minimale par rapport à l'article premier de la Convention, a-t-elle fait observer.  La Suisse prévoit-elle de tenir des statistiques sur l'invocation de la Convention par les tribunaux, a en outre demandé l'experte, affirmant que les magistrats helvétiques avaient une connaissance limitée de cet instrument? 

Une experte a jugé nécessaire la création d'une institution nationale des droits de l'homme indépendante. 

La Suisse entend-elle accroitre son soutien aux organisations de la société civile œuvrant dans le domaine des femmes, de la paix et de la sécurité, thème de la Résolution 1325 du Conseil de sécurité, a-t-il d'autre part été demandé?

Une autre experte a évoqué la situation des femmes immigrées, musulmanes en particulier, qui, de l'aveu même de la cheffe de la délégation, sont confrontées à une méfiance croissante voire à des stéréotypes négatifs de la part de la population.

Pour quelle raison la Suisse n'envisage-t-elle pas de ratifier la Convention d'Istanbul avant 2018, a-t-il en outre été demandé?  Y a-t-il des obstacles à la mise en œuvre de cet instrument?  La Suisse prévoit-elle d'en finir avec les châtiments corporels, a demandé une experte?

Si la Suisse a ratifié un certain nombre d'instruments relatifs à la traite, la situation demeure préoccupante du fait de l'absence de statistiques ventilées permettant de mesurer l'ampleur du phénomène, a fait observer une experte, rappelant qu'il s'agissait là d'une préoccupation déjà exprimée par le Comité.  La délégation dispose-t-elle de chiffres sur le nombre de poursuites et de condamnations pour traite de personnes? Existe-t-il des centres d'accueil pour les victimes?  La même experte s'est inquiétée de la situation des résidentes illégales victimes de la traite et menacées d'expulsion si elles ne collaborent pas avec la police.  Par ailleurs, la Suisse envisage-t-elle de sanctionner les clients des prostituées, comme cela se fait en Suède?

Une experte a évoqué le problème des pratiques néfastes, souhaitant savoir si la Suisse s'inspirait de l'Observation générale n°31 du Comité, qui traite de cette question.  Une de ses collègues a affirmé que des mutilations étaient pratiquées en milieu hospitalier, estimant qu'il s'agissait là d'une violation des droits de la personne.

Une experte s'est demandée pour quelles raisons les femmes continuaient d'être sous-représentées dans les organes dirigeants du pays, notant que leur représentation au sein du Gouvernement dépassait à peine les 28%. 

Une experte a constaté que si les taux de scolarisation des garçons et des filles étaient semblables, les choix de formation et de carrière restaient stéréotypés en fonction du sexe, ce qui explique au moins en partie les écarts salariaux subsistant entre les deux sexes.  La Suisse prévoit-elle d'analyser et de réformer son système d'éducation actuel?

Une experte a attiré l'attention sur les disparités en matière d'accès à la santé entre les Suissesses et les migrantes.  Elle s'est étonnée de l'absence de données sur le VIH/sida.  Elle a aussi demandé si les victimes  des mutilations génitales féminines avaient accès au système de santé.  Elle s'est en outre enquise de la reconnaissance des besoins spécifiques des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexuées, s'agissant notamment du choix du sexe et du nom à l'âge adulte. 

En Suisse, un résident sur douze vit sous le seuil de pauvreté, a pour sa part affirmé une experte.  Dans ce contexte, les mesures de protection sociale ont-elles une approche spécifique au genre, a-t-elle demandé?

Réponses de la délégation

La réserve à la Convention formulée par la Suisse dans le domaine du droit matrimonial sera maintenue, a indiqué la délégation.  La réserve ne concerne qu'un nombre limité et toujours plus restreint de mariages qui ont été conclus avant 1988, a-t-elle rappelé.  La situation juridique ne s'est pas modifiée depuis, raison pour laquelle la réserve demeure, a-t-elle expliqué. 

La délégation a rappelé que la Suisse ayant opté pour un système moniste, les dispositions des instruments internationaux sont d'application directe.  Tel sera donc le cas pour la Convention d'Istanbul contre la violence domestique dès qu'elle aura été ratifiée. 

La Suisse a une approche «particulièrement méticuleuse» lorsqu'elle signe et ratifie une convention, afin de s'assurer, à l'issue d'une large concertation, que l'instrument peut être pleinement mis en œuvre, a insisté la délégation.  Le délai que cela impose (pour s'en assurer) n'est pas du temps perdu pour autant, a-t-elle souligné, en réponse aux interrogations soulevées au sujet de la ratification de la Convention d'Istanbul. 

La délégation a tenu à rappeler que le Tribunal fédéral avait estimé que la Convention laissait aux États parties le choix des moyens qu'ils souhaitaient employer pour éliminer la discrimination envers les femmes.  Dans les faits, c'est aux tribunaux de se prononcer sur l'applicabilité directe de chacune des dispositions des conventions internationales.  La délégation a assuré que la Convention pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes était de plus en plus fréquemment invoquée par la justice.

S'agissant précisément de l'invocation de la Convention par les tribunaux, si aucune statistique spécifique n'existe, il est possible de trouver sur Internet le répertoire des affaires traitées par la justice suisse, a souligné la délégation.  Outre le cursus universitaire, il existe des actions de formation continue des juges aux instruments internationaux; et outre la sensibilisation des professionnels, une brochure sur la Convention a fait l'objet d'une large diffusion, en particulier dans les établissements scolaires. 

S'agissant de la création d'une institution nationale des droits de l'homme, la délégation a expliqué que le Centre suisse de compétence pour les droits humains (CSDH) avait fait l'objet d'une évaluation indépendante en 2015.  Celle-ci a montré que le Centre avait principalement effectué des études et organisé des journées thématiques et que la qualité des travaux avait été jugée bonne voire très bonne.  Le Centre a contribué au renforcement de la politique en matière de droits de l'homme.  Toutefois, il lui a été plus difficile de sensibiliser le grand public.  Le manque d'indépendance formelle du Centre a été considéré comme le handicap le plus important du projet pilote.  Une grande majorité des personnes interrogées se sont prononcées en faveur de l'établissement d'une institution permanente.  En juillet 2015, le Conseil fédéral a décidé de prolonger le mandat du CSDH pour une durée maximale de cinq ans.  Celui-ci devra s'appuyer sur les Principes de Paris en s'adaptant à la situation spécifique de la Suisse. 

Pour ce qui est des mesures temporaires spéciales, la Suisse a une «approche prudente et proportionnée», du fait notamment du rejet par le peuple – lors d'une votation – de l'idée d'instaurer des quotas en politique.  La Suisse reconnaît néanmoins que la fixation d'objectifs chiffrés peut être productive.  La délégation a reconnu qu'une insuffisante représentation des femmes dans certaines entités donnait une mauvaise image à l'extérieur. 

Les cantons organisent des formations pour les femmes souhaitant s'engager en politique, a alors poursuivi la délégation.  Au Parlement du Tessin, par exemple, la représentation féminine est passée de 15% à près de 25% à l'issue du dernier scrutin.  «Le mouvement est en marche, même si l'instauration d'un outil spécifique est regardé avec méfiance, en particulier dans le monde politique», a insisté la délégation.  Elle a reconnu que les efforts devaient être maintenus, le bilan de la progression féminine étant décevant.  Mener une carrière politique n'est pas simple, a souligné la délégation.

S'agissant de l'application de la Résolution 1325 du Conseil de sécurité relative aux femmes, à la paix et à la sécurité, la Suisse a mis en place des indicateurs et une obligation de rapport au Parlement, a ensuite indiqué la délégation, avant de souligner qu'une collaboration très étroite avec la société civile était nouée à ce sujet.  La Suisse encourage les femmes à participer aux processus politiques, notamment contre l'extrémisme violent.  La Suisse reconnaît, par ailleurs, la problématique posée par les armes légères et de petit calibre qui jouent un rôle non négligeable dans la violence contre les femmes. 

Lorsque la Suisse autorise l'exportation de matériel de guerre à destination de tel ou tel pays après s'être assuré qu'il ne serait pas utilisé pour violer les droits fondamentaux, elle peut se rendre sur place pour vérifier que ce matériel n'est pas réexporté vers un pays tiers.  La délégation a affirmé qu'elle était le seul pays à effectuer une telle vérification in situ.

Tous les cantons offrent des cours de langue aux femmes migrantes, avec notamment des cours spécifiques pour les mères et les femmes enceintes; certains de ces cours ne sont pas mixtes.  Des questions relatives à la santé, à l'éducation et à la vie quotidienne en Suisse en général sont abordées dans le cadre d'ateliers organisés à l'intention des migrantes, a précisé la délégation.  Le Bureau de l'intégration du canton de Genève a veillé à aider des femmes voilées à trouver des stages dans le secteur de la pharmacie où elles se heurtaient à des refus fréquents. 

L'état de santé de la population migrante en Suisse est moins bon que celui du reste de la population, raison pour laquelle un programme fédéral a été lancé afin de réduire les discriminations évitables dans ce domaine, a ensuite fait observer la délégation.  Toute personne présente pour plus de trois mois en Suisse est assurée de pouvoir bénéficier de soins médicaux gratuits, y compris si elle ne dispose pas d'un titre de séjour, a-t-elle ajouté.  

La plupart des cantons et des villes promeuvent le dialogue interreligieux, a ajouté la délégation.  Dans les médias, la Confédération a participé à la campagne du Conseil de l'Europe contre les discours de haine, a-t-elle fait valoir.

S'agissant des châtiments corporels, la délégation a souligné que depuis 1979, les parents n'avaient plus de droit de correction sur leurs enfants.  La Suisse estime que – plutôt que des actions en justice – des mesures protectrices de l'enfant combinées à des mesures de sensibilisation active des parents sont le mieux à même de faire régresser la pratique de la gifle ou de la fessée,. 

Des formations interdisciplinaires sont dispensées au bénéfice des professionnels concernés par la lutte contre la traite des êtres humains, a ensuite fait valoir la délégation.  Par ailleurs, des mécanismes de coopération interinstitutions sont mis en place au niveau des cantons pour lutter contre ce fléau.  S'agissant du droit de séjour, la Suisse se conforme aux dispositions de la Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite.  Quant aux travailleuses domestiques, qui sont particulièrement exposées à la traite, la Suisse a ratifié la Convention n°189 de l'Organisation internationale du travail (OIT), a rappelé la délégation.

Du fait de l'immigration en provenance de pays où existent les mutilations génitales féminines, la Suisse est de plus en plus fréquemment confrontée aux pratiques traditionnelles néfastes, 14 700 femmes étant concernées ou menacées, a poursuivi la délégation.  La Suisse a donc encouragé à la création d'un réseau contre les mutilations et l'Observation générale du Comité sur ce sujet est une source d'inspiration pour les autorités helvétiques, a-t-elle précisé.  Si le Code pénal réprime cette pratique depuis 2012, il n'y a eu aucune condamnation en justice depuis cette date, d'où la nécessité de sensibiliser les communautés concernées, a ajouté la délégation.

L'éventuelle pénalisation des clients des prostituées a été largement débattue, notamment au Parlement fédéral, a d'autre part rappelé la délégation.  Il a été considéré que le modèle suédois n'était pas souhaitable car il reléguerait la prostitution dans la clandestinité, a-t-elle indiqué.

La Suisse a élaboré des lignes directrices en faveur des défenseurs des droits de l'homme, les représentations suisses à l'étranger y étant régulièrement sensibilisées.  La promotion et la protection des défenseurs droits de l'homme figure dans la Stratégie suisse des droits de l'homme 2016-2019, a d'autre part fait valoir la délégation. 

La délégation, qui a rappelé que l'éducation relevait des cantons, a expliqué que si la Suisse pouvait être fière de l'efficacité de son système d'apprentissage professionnel, celui-ci pouvait toutefois avoir tendance à conforter les stéréotypes sexistes lorsque les jeunes choisissent leur orientation et le métier qu'ils vont apprendre.  Des efforts sont faits pour informer les jeunes filles sur les métiers «atypiques» pour elles; la délégation a énuméré un certain nombre de programmes mis en œuvre pour surmonter les préjugés et inciter les filles à opter pour des filières techniques, par exemple.  La formation des enseignants est cruciale pour qu'ils informent objectivement leurs élèves des perspectives professionnelles qui s'offrent à eux, a estimé la délégation. 

La Charte fédérale sur l'égalité faisait reposer sur l'individu la charge de la preuve lorsqu'il s'agissait pour lui de prouver qu'il était victime d'une discrimination; or, il a été constaté qu'il était très difficile pour les travailleurs concernés, par exemple, de se retourner contre leur employeur afin d'apporter une telle preuve.  D'où le projet sur des mesures complémentaires permettant de réaliser l'égalité salariale, qui viserait à faire en sorte que ce soient les entreprises qui apportent la preuve qu'elles respectent l'égalité de traitement, a indiqué la délégation.

Entre 1996 et aujourd'hui, a poursuivi la délégation, quelque 900 affaires (de discrimination) ont été portées à l'attention des tribunaux, 200 pour des questions de harcèlement sexuel et 300 en rapport avec des contentieux portant sur l'égalité salariale.  Dans la moitié des cas, la victime a eu totalement ou en partie gain de cause, a précisé la délégation.

La Suisse ne s'est pas dotée d'un congé de paternité au niveau fédéral, a d'autre part rappelé la délégation.  De nombreux pères bénéficient toutefois de jours de congés, parfois payés, à la naissance d'un enfant, en vertu de lois locales ou de conventions collectives.  Le peuple sera amené à se prononcer sur la création d'un tel congé de paternité, a ajouté la délégation.

Le Bureau fédéral de l'égalité pour les personnes handicapées accorde des aides financières à différents projets, dont certains portent sur le domaine de la santé et s'adressent plus particulièrement aux femmes handicapées, a d'autre part fait valoir la délégation.  La loi fédérale sur l'élimination des inégalités frappant les personnes handicapées a pour but de faciliter la participation des personnes handicapées à la vie de la société, en les aidant notamment à être autonomes dans l'exercice d'une activité professionnelle.  La Confédération soutient en outre différents projets visant à améliorer l'accès aux soins des personnes handicapées.  De plus, l'autodétermination a été renforcée pour les personnes ayant des capacités de discernement limitées.

En 2012, l'Office fédéral de l'état civil a demandé aux cantons de ne pas exiger des interventions chirurgicales visant à la stérilité ou à la construction d'organes génitaux du sexe opposé comme condition préalable au changement légal de sexe.  Repris par la Cour européenne des droits de l'homme, cet avis de droit s'est imposé dans la pratique.  Le changement de sexe implique une procédure judiciaire, mais une procédure simplifiée du changement de sexe va être introduite prochainement, a indiqué la délégation.

La protection sociale est le principal moyen de lutte contre la pauvreté en Suisse, a expliqué la délégation.  La Sécurité sociale, qui est du ressort du fédéral, couvre tous les risques sociaux, tandis que l'aide sociale, qui relève de la compétence cantonale, est l'ultime filet de sécurité des personnes dans le besoin.

Un groupe de travail national a été créé pour évaluer les conditions de vie des Gens du voyage.  Y siègent des représentants des populations nomades ainsi que des fonctionnaires fédéraux, cantonaux et municipaux, a indiqué la délégation. 

Remarques de conclusion

Concluant ce dialogue, MME DURRER, Directrice du Bureau fédéral de l'égalité entre femmes et hommes au Département fédéral de l'intérieur de la Suisse, a fait observer que sa délégation avait pu présenter tant les progrès réalisés que les lacunes et difficultés persistantes, notamment la «lente mais déterminée avancée vers la ratification de la Convention d'Istanbul».  Elle a souligné que la ratification n'était que le couronnement de nombreuses mesures prises pour améliorer la protection des victimes.  C'est parce que nous prenons très au sérieux nos engagements que nous pouvons parfois paraître avancer lentement; avancer lentement n'est pas attendre, a insisté la cheffe de délégation.

Mme Durrer a ensuite commenté la suggestion des membres du Comité d'instaurer des quotas en politique, en affirmant qu'une telle mesure était «actuellement impossible»; elle a ajouté qu'elle n'était «pas en mesure de dire aujourd'hui si cet outil serait un jour évident pour la Suisse».  Mme Durrer s'est ensuite dite consciente de la nécessité de faire connaître encore mieux la Convention dans tous les milieux, y compris le milieu juridique.

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Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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