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La Commission d'Enquête sur la Syrie: toutes les parties ont une attitude de plus en plus négligente envers la vie humaine alors que le conflit syrien perdure

18 février 2013

Genève, le 18 Février 2013 -- Dans son dernier rapport, publié aujourd'hui, la commission d'enquête sur la Syrie estime qu’alors que le conflit touche à la fin de sa deuxième année, aussi bien les forces gouvernementales que l’opposition armée manifestent une violence et une désinvolture croissante à l’égard de la vie humaine. Le rapport souligne la nécessité urgente que les parties au conflit s'engagent à une solution politique pour mettre fin à la violence.

Bien que le Gouvernement syrien n'ait toujours pas autorisé la Commission à entreprendre des enquêtes à l'intérieur de la Syrie, les 445 entretiens réalisés pendant la période considérée mettent à nu le coût humain d'un conflit qui s’est progressivement radicalisé et militarisé. Dans un nombre important de régions en Syrie, le combat est continu, nécessitant l’utilisation de tactiques toujours plus brutales et de nouvelles capacités militaires de la part de tous les acteurs.

La guerre, imprégnée par la criminalité opportuniste, a pris des connotations sectaires qui ont été aggravées par la présence de combattants étrangers et de groupes extrémistes. Une catastrophe humanitaire en a découlé, avec des dizaines de milliers de morts et des millions de déplacés internes. Selon les derniers chiffres de l'ONU, plus de 820.000 Syriens ont cherché refuge dans les pays voisins.

Les forces gouvernementales et les groupes armés antigouvernementaux ont perpétré des massacres de civils et de combattants hors de combat.

À travers la Syrie, les forces gouvernementales et des milices qui y sont affiliées ont arbitrairement arrêté des individus au cours de perquisitions et aux points de contrôle. À ces endroits - et dans les centres de détention officiels et non-officiels - le meurtre, la torture, le viol, les disparitions forcées et d’autres actes inhumains ont eu lieu. Commis dans le cadre d'une attaque généralisée et systématique, ces crimes, pourraient constituer des crimes contre l'humanité.

«La stratégie de contraction» du gouvernement a donné lieu à des attaques soutenues et concertées dans les zones urbaines où des groupes armés antigouvernementaux sont présents. Les témoignages de déserteurs indiquent qu'aucune distinction n'est faite entre les civils et les combattants. Les attaques aériennes ciblant les hôpitaux, les boulangeries et les queues pour le pain laissent apparaître un schéma inquiétant. Douze cas ont été documentés où des avions à réaction du gouvernement ont bombardé des queues pour le pain, souvent, alors que des centaines de civils faisaient la queue à la suite d'une pénurie prolongée. Ce type d’attaque tue un nombre important de civils et a contribué à la situation humanitaire désastreuse de la population civile. La démolition de quartiers entiers par les forces gouvernementales a également été documentée.

La commission a constaté qu’en prenant contrôle du territoire, les groupes armés antigouvernementaux ont commis des meurtres, des actes de torture, des détentions arbitraires et des prises d'otages, autant d’actes qui pourraient constituer des crimes de guerre. Des attentats à la voiture piégée et des attentats suicides par des groupes armés visant des objectifs non-militaires sèment la terreur parmi la population civile. Des groupes armés de l’opposition continuent de mener leurs opérations à partir de villes et de villages à dense population, mettant en danger les civils restants dans ces endroits. Le nombre de combattants étrangers a augmenté, bien qu'ils restent une petite proportion parmi les rangs des groupes armés.

Les forces gouvernementales, les milices qui y sont affiliées et les groupes armés antigouvernementaux ont violé les droits des enfants. Des incidents d'enfants tués, torturés et violés par des forces pro-gouvernementales ont été enregistrés. Des enfants de moins de 15 ans ont participé de manière active aux hostilités - y compris en tant que combattants – au sein de certains groupes armés antigouvernementaux.

Bien qu'aucune distinction ne peut être faite par rapport à la gravité des violations et des abus commis par les forces pro- et antigouvernementales, la commission note que l'ampleur des violations commises par les forces gouvernementales et les milices qui y sont affiliées dépasse largement celles commises par les groupes armées antigouvernementaux.

La responsabilité d’assurer que les auteurs de crimes de guerre et crimes contre l'humanité ne restent pas impunis revient au Gouvernement de la République Arabe Syrienne, au Conseil de sécurité des Nations Unies, et à d'autres pays influents. Il est nécessaire d'agir de façon urgente afin d'assurer que justice soit faite pour les crimes commis. A travers le recueillement des informations de première main et la documentation d’incidents, la commission est en train d’établir la base nécessaire pour assurer que les responsabilités pour les violations soient établies, que ce soit au niveau national, régional ou international. En mars 2013, une liste confidentielle de personnes et d’unités qui pourraient être responsables de crimes sera soumise à la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme.

Composition

La commission, qui est composée de M. Paulo Sérgio Pinheiro (Président), Mme. Karen Koning AbuZayd, Mme. Carla del Ponte et M. Vitit Muntarbhorn, a été mandatée par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies d’enquêter et d’enregistrer toutes les violations du droit international relatif aux droits de l’homme. La Commission a également été chargée d'enquêter des allégations de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre, et son mandat a récemment été élargi pour inclure « des enquêtes de tous les massacres».

Le rapport complet peut être consulté sur la page web du Conseil des droits de l'homme consacrée à la commission d'enquête sur la République Arabe Syrienne: http://www.ohchr.org/EN/HRBodies/HRC/IICISyria/Pages/IndependentInternationalCommission. Le rapport devrait être présenté le 11 mars lors d'un dialogue interactif pendant de la 22e session du Conseil des droits de l’homme.

Pour plus d’information: prière de contacter Rolando Gomez, au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, Tél: +41-22-917 9711, e-mail:
[email protected]