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Communiqués de presse Organes conventionnels
07 février 2022
Le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes a auditionné, cet après-midi, les représentants de la société civile s’agissant de l’application de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes au Panama, en Ouganda et au Sénégal – trois des quatre pays dont les rapports doivent être examinés cette semaine [l’autre étant le Gabon].
S’agissant du Panama, une organisation non gouvernementale a dénoncé des violences sexuelles et sexistes perpétrées à l'encontre des Haïtiennes et d’autres femmes noires migrant au Panama en passant par la région du Darién, située à la frontière entre ce pays et la Colombie. À ce propos, l’institution du défenseur du peuple du Panama a fait état de visites conjointes organisées dans cette région avec d’autres institutions nationales de droits de l’homme de pays concernés.
Concernant l’Ouganda, plusieurs organisations ont mis en avant les problèmes d’accès des jeunes filles et des femmes ougandaises aux services et informations en matière de santé sexuelle et reproductive ; le problème des mutilations génitales féminines ; les difficultés rencontrées par les femmes musulmanes dans le domaine du mariage ; des formes multiples et croisées de discrimination envers les femmes handicapées ; ou encore l’importance de s'attaquer aux causes profondes de la violence à laquelle les défenseurs des droits humains sont confrontés.
Pour ce qui concerne le Sénégal, une ONG a été relevé que le Code de la famille posait plusieurs problèmes, s’agissant notamment du fait que l’autorité parentale est exercée uniquement par le père et que le mariage est autorisé dès l’âge de 16 ans, ce qui nuit au développement des jeunes filles. En outre, les femmes accèdent toujours difficilement à la terre, alors que rien dans la loi ne s’y oppose théoriquement : il faudrait une « révolution culturelle » pour dépasser la dualité entre le droit et la coutume, a dit l’ONG.
En début de séance, la Présidente du Comité, Mme Gladys Acosta Vargas, a rappelé que les organisations non gouvernementales avaient le droit d'accéder sans restriction au Comité et de communiquer avec ses membres. Les personnes ou groupes de personnes qui, ce faisant, font l'objet d'actes d'intimidation ou de représailles peuvent signaler tout incident présumé d'intimidation ou de représailles au rapporteur sur les représailles et au rapporteur suppléant nommé par le Comité, a indiqué la Présidente.
Le Comité examinera le rapport du Gabon (CEDAW/C/GAB/7) demain matin, à partir de 11 heures.
AUDITION DES ONG
S’agissant du Panama
Parmi les organisations non gouvernementales (ONG) qui se sont exprimées concernant l’application de la Convention au Panama, la Haitian Bridge Alliance a évoqué les violences subies par les migrantes et les migrants qui traversent l’Amérique centrale et du Sud en direction des États-Unis. L’organisation a dénoncé, en particulier, « d’horribles violences sexuelles et sexistes perpétrées à l'encontre des Haïtiennes et d’autres femmes noires » qui traversent la région du Darién [à la frontière entre le Panama et la Colombie]. Le Panama, a dit un représentant de l’ONG, reconnaît, au paragraphe 95 de son rapport, que les femmes d'origine africaine au Panama sont particulièrement vulnérables à la violence discriminatoire, et mentionne une commission d'urgence pour assurer la prise en charge des migrants vulnérables ; mais le Panama ne mentionne nulle part cette violence sexuelle et sexiste brutale dans la région de Darién, a regretté le représentant.
L’orateur a ensuite estimé que le Panama devrait fournir des données ventilées concernant les violences fondées sur l’identité de genre dans la région de Darién en 2021 ; diligenter une enquête sur ces comportements discriminatoires et violents ; et formuler un plan pour que ces comportements ne se reproduisent pas.
L’institution du Défenseur du peuple du Panama a décrit ses activités en matière de protection des droits des femmes dans ce pays. Elle a notamment fait état de la création d’un observatoire des violences faites aux femmes, ainsi que de la réalisation d’études sur les problèmes rencontrés par les femmes détenues et des visites de lieux de détention qu’elle effectue. Des visites ont aussi été organisées, avec les défenseurs d’autres pays concernés, dans la région de Darién, où ont été signalées des violences et agressions contre des femmes migrantes.
S'agissant de l’Ouganda
Une représentante du Human Rights Awareness and Promotion Forum (HRAPF) et du Center for Reproductive Rights (CRR) a déclaré que les adolescentes ougandaises n’avaient pas accès aux services et informations en matière de santé sexuelle et reproductive. Le taux d'utilisation de contraceptifs modernes parmi les adolescentes est assez faible (9,4%), alors que 20% des filles sont mariées avant l'âge de 19 ans et que 62% des filles sont sexuellement actives avant l'âge de 18 ans. De nombreux obstacles entravent l'accès aux informations et aux services de santé sexuelle et reproductive, parmi lesquels les questions de coût ou encore la criminalisation de l'avortement, a souligné l’oratrice.
L'Ouganda devrait adopter une législation et des programmes visant à garantir la réalisation du meilleur niveau possible de santé sexuelle et reproductive pour les adolescents et les femmes marginalisées, et mettre en place des mesures administratives, sociales et économiques pour garantir que les femmes vivant dans les camps de réfugiés soient protégées contre la violence sexuelle et sexiste, a en outre demandé la représentante.
Une représentante de Franciscans International, au nom de plusieurs autres ONG, a attiré l'attention des membres du Comité sur le fait que le poids culturel des mutilations génitales féminines, en tant que rite de passage à l'âge adulte, l'emportait en Ouganda sur la mise en œuvre de la loi de 2010 interdisant les mutilations génitales féminines et ce, en particulier dans l'est du pays. En outre, la criminalisation des mutilations génitales féminines a entraîné une augmentation des mutilations pratiquées en secret, ce qui met encore plus en danger la santé des filles et des femmes. À ce jour, l'acceptation sociale dominante de la pratique, mais aussi la corruption, font que de nombreux crimes de mutilation restent impunis, a regretté l’ONG.
Au nom d’IWILAP (initiative des femmes islamiques pour la justice, le droit et la paix) et de Musawah, une intervenante a évoqué les difficultés rencontrées par les femmes musulmanes en Ouganda dans le domaine du mariage au regard du système juridique pluriel auquel elles sont confrontées: outre la Constitution ougandaise, les musulmans sont en effet régis par la loi (de 1906) sur le mariage et le divorce des mahométans. Les femmes musulmanes sont ainsi confrontées, dans le cadre de leur mariage et de leur vie de famille, à des discriminations intersectionnelles qui découlent d'interprétations patriarcales négatives de la religion.
D’autre part, les mariages forcés ou non enregistrés de jeunes filles musulmanes encore mineures sont nombreux, du fait de la prévalence des interprétations patriarcales de l'IslaM.
Une représentante de l’Association nationale des femmes handicapées en Ouganda (NUDOWU) a fait état, pour sa part, de formes multiples et croisées de discrimination envers les femmes handicapées en Ouganda, notamment dans l’obtention des services de santé et d’éducation, dans la représentation politique, l’emploi et l’accès à la justice. D’autre part, environ 70% des filles handicapées subissent des violences sexuelles avant d'atteindre l'âge adulte, a-t-elle ajouté. Cette situation est aggravée par la stigmatisation, par les stéréotypes à l'encontre des femmes handicapées et par un système judiciaire qui ne prend pas suffisamment en compte les femmes handicapées, en particulier celles souffrant de déficience intellectuelle.
Au nom du réseau SIHA, (Initiative stratégique pour les femmes dans la Corne de l’Afrique), une oratrice a insisté sur le fait que le système juridique complexe de l’Ouganda empêchait les femmes d’accéder à la justice, malgré les garanties constitutionnelles. La discrimination à l'égard des femmes est justifiée par des motifs religieux et culturels, ce qui rend la contestation plus difficile pour les personnes et les organisations.
Pour le réseau SIHA, l'absence d'une loi complète sur la famille, de même que les retards dans la promulgation du projet de loi sur le mariage, exposent les femmes à une violence sexiste et à des problèmes de santé génésique. Quant aux femmes ougandaises vivant dans des mariages et des unions polygames, elles sont confrontées à des inégalités substantielles et manquent de sécurité et de stabilité financières, ce qui les rend vulnérables à la violence domestique. L’ONG a donc recommandé que l’Ouganda adopte sans tarder le projet de loi sur le mariage et applique un plan de mise en œuvre de la loi qui comprenne un volet de sensibilisation au niveau national et au niveau des quartiers.
Le réseau de défense des femmes défenseures des droits humains en Ouganda (WHRDNU) a déclaré que les femmes défenseures des droits humains en Ouganda étaient confrontées à des problèmes bien particuliers, non seulement parce qu'elles transgressent les normes de genre en s'engageant dans le travail de promotion et de protection des droits humains, mais aussi souvent en raison de la nature de leur travail. Les défenseurs des droits humains qui s'identifient à la communauté LGBTI ou qui travaillent avec elle sont particulièrement exposés, de même que celles et ceux qui travaillent à la promotion et à la protection des droits des travailleurs du sexe, ainsi que les défenseurs des droits humains liés à la terre et à l'environnement.
Le projet de loi sur la protection des défenseurs des droits humains a été déposé en 2020 et se trouve devant le Parlement, a fait observer la représentante du réseau, avant de plaider pour que ce projet de loi et ses plans d’application tiennent pleinement compte de la dimension de genre.
La promulgation d'une loi sur la protection des défenseurs des droits humains est une avancée importante, mais insuffisante sans une révision globale de l'environnement législatif dans lequel les défenseurs des droits humains opèrent, a insisté l’oratrice. Le but doit être de s'attaquer aux causes profondes de la violence et de la discrimination auxquelles les défenseurs des droits humains sont confrontés en Ouganda, a-t-elle souligné.
S’agissant du Sénégal
Enfin, l’Association des juristes sénégalaises a fait état de progrès réalisés dans le pays depuis l’adoption de la Constitution de 2001, qui introduit un nouveau statut pour la femme ainsi qu’une qualification et une criminalisation spécifiques du viol et de la pédophilie. L’ONG a insisté sur le caractère endémique du viol au Sénégal – un problème au sujet duquel l’organisation a indiqué qu’elle assure la prise en charge et la réinsertion des victimes. Mais la loi du silence règne et, pour des raisons culturelles, la dénonciation du viol n’est pas aisée, a ajouté la représentante de l’Association.
Le Code de la famille pose plusieurs problèmes, a poursuivi l’oratrice: les droits des femmes y sont lésés, de même que ceux de l’enfant. L’autorité parentale est en effet exercée uniquement par le père ; en outre, le Code de la famille autorise le mariage dès l’âge de 16 ans, ce qui nuit au développement des jeunes filles.
Enfin, pour des raisons culturelles, les femmes accèdent toujours difficilement à la terre, alors que rien dans la loi ne s’y oppose théoriquement, a souligné l’ONG ; il faudrait une « révolution culturelle » pour dépasser la dualité entre le droit et la coutume, a-t-elle ajouté.
Répondant aux questions d’expertes du Comité, l’Association a précisé que les femmes devaient elles-mêmes être formées et sensibilisées au fait que, contrairement aux croyances, elles ont un droit égal d’accès à la terre – cet accès conditionnant lui-même l’intégration économique des femmes. Il faut donc convaincre les femmes de se battre pour leurs droits. Le problème des violences domestiques n’est pas lié à la religion, a ajouté l’ONG : la précarité et la promiscuité sont en cause.
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