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Déclarations Haut-Commissariat aux droits de l’homme

Discours de la Haut-Commissaire adjoint des Nations Unies aux droits de l'homme, Madame Kyung-wha Kang, à N'Djamena, Tchad

03 avril 2012

3 avril 2012

Bonjour,

Je vous remercie tous d'être venus. Il s'agit de ma première visite au Tchad et cela a été un grand plaisir de visiter votre pays et de voir ses cultures et ses peuples immensément riches. Je voudrais vous donner un bref aperçu de ma visite.

Au cours des deux derniers jours, j'ai eu l'honneur de tenir des réunions avec le président Idriss Deby Itno et le Premier ministre Emmanuel Nadingar. J'ai également rencontré les ministres des Affaires étrangères ; de la justice ; et des droits de l'homme et des libertés fondamentales. J'ai eu des entretiens avec le Président du Parlement et le Bureau de la Commission nationale des droits de l'homme du Tchad. Ce fut également été un plaisir pour moi de rencontrer des organisations de la société civile, les membres de la communauté internationale et mes collègues de la famille des Nations Unies. Je tiens à remercier le gouvernement pour leur hospitalité et leur disponibilité, et pour les séances de travail productives que j'ai eu avec eux.

Le Tchad a fait des efforts notables pour promouvoir et protéger les droits de l'homme, comme me l’ont assuré les différents membres du gouvernement que j'ai rencontrés. Suite à la fermeture en Décembre 2010 de la MINURCAT, qui comprenait une composante droits de l'homme desservie par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, le Gouvernement tchadien a exprimé le souhait de continuer d’accueillir une présence droits de l'homme sur le terrain avec un mandat couvrant l'ensemble du pays.

C'est pourquoi l'année dernière la Haut-Commissaire a déployé un conseiller aux droits de l'homme au Tchad, dont la mission est de travailler en étroite collaboration avec l'équipe pays des Nations Unies en appui au gouvernement, aux institutions nationales et à la société civile. Je suis reconnaissante qu'ils aient facilité le travail du Conseiller des Nations Unies aux droits de l'homme. En outre, mes interlocuteurs des deux derniers jours ont exprimé la nécessité d'envisager la création d'un bureau à part entière du HCDH afin de répondre aux très nombreuses questions relatives aux droits de l'homme auxquelles le Tchad est confronté.

Mécanismes et instruments des droits humains

Le gouvernement a pris des mesures importantes en matière d'harmonisation de la législation nationale avec le droit international relatif aux droits de l’homme, y compris la création en décembre 2011 d'un Comité gouvernemental sur la mise en œuvre des instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme auxquels le Tchad est partie. Le Tchad a également mis en place un plan d'action national des droits de l’homme basé, entre autres mécanismes, sur les recommandations de l'Examen périodique universel (EPU) du Tchad par le Conseil des droits de l'homme. Une des raisons de ma visite était d'assister au lancement ce matin d'un atelier organisé avec le soutien de l'Organisation Internationale de la Francophonie, pour examiner ce plan d'action.

J'ai été informée que la nouvelle loi sur la Commission nationale des droits de l'homme a été harmonisée avec les Principes de Paris et est en attente d'adoption formelle par le Conseil des Ministres et, plus tard, le Parlement.

Le Tchad a ratifié la plupart des principaux traités internationaux relatifs aux droits de l'homme qui fourniront au pays un cadre solide pour guider son développement et la modification des lois et des politiques nationales relatives aux droits de l'homme. Au cours de ma visite, j'ai invité le gouvernement à envisager également de ratifier la Convention relative aux droits des personnes handicapées, la Convention sur les disparitions forcées, et la Convention relative aux droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles. J'ai aussi encouragé le gouvernement à adresser une invitation permanente aux procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme.

La crise alimentaire

C'est un moment crucial pour les droits de l'homme dans le pays. Je suis très préoccupée par la crise alimentaire et j'encourage le gouvernement à poursuivre l'intégration d'une approche basée sur les droits de l’homme dans sa réponse humanitaire et ses plans de développement à long terme. Il est également vital que la communauté internationale continue de financer les programmes d'aide essentiels au Tchad qui procurent un soulagement immédiat pour des millions de personnes qui souffrent d'insécurité alimentaire chronique et de malnutrition aiguë.

Violence contre les femmes, l'impunité et de la magistrature

Malgré les mesures notables prises par le gouvernement, le pouvoir judiciaire n'a pas suivi le rythme de l'évolution des obligations du Tchad en matière des droits de l'homme, et l'impunité reste un problème urgent. Je félicite le gouvernement pour ses efforts visant à mettre en œuvre les principales recommandations de la Commission nationale d'enquête qui a enquêté sur les violations des droits de l’homme qui ont eu lieu à N'Djamena en Février 2008. Cependant, la majorité de ceux qui ont perpétré de graves violations des droits de l'homme n'ont pas été traduits en justice. Le manque de capacité, un sous-financement et la question de l'indépendance du pouvoir judiciaire restent une préoccupation. Une importante réforme du système judiciaire, soutenu par l'Union Européenne, a commencé en 2009 et j'encourage le gouvernement à redoubler d'efforts dans ce sens en vue de mettre fin à l'impunité.

Le mois dernier, le Tchad a participé activement aux célébrations de la Journée internationale de la femme. La Journée a été l'occasion de rappeler à tous l'importance de l'égalité des sexes et de reconnaître et d’exploiter l'énorme potentiel des femmes à influer positivement sur le monde autour d’elles. Pour qu’elles puissent réaliser leur plein potentiel, elles ont besoin de l’égalité des droits et des chances, de la protection et du respect. Malheureusement, la discrimination contre les femmes et les filles, et la violence sexuelle persistent au Tchad aujourd'hui.

J'ai appelé le gouvernement à veiller à ce que les auteurs de violences sexuelles soient traduits en justice et tenus pour responsables de leurs crimes, et j’ai été assurée qu'ils le seront. Je tiens également à encourager le Tchad à aller de l'avant avec l'adoption d'un Code de protection de l'enfance, d’un Code de la famille et des personnes, et la réforme du Code pénal, pour combattre en particulier l'impunité pour la violence sexuelle, la traite des enfants, les pratique culturelles néfastes et la torture. Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme se tient prêt à fournir une assistance technique aux autorités judiciaires afin de faire respecter l’Etat de droit et mettre fin à l'impunité.

La société civile

J'ai également eu l'occasion d’avoir des discussions avec les organisations de la société civile et des défenseurs des droits de l’homme qui jouent un rôle vital dans la protection des droits de l'homme au Tchad. Ils m'ont parlé des difficultés qu'ils rencontrent dans l'accomplissement de leurs activités et je dois saluer leur dévouement et leur énergie dans ces circonstances. Ils ont soulevé la question des expulsions forcées qui a touché des milliers de familles et le nombre semble accroitre. À cet égard, j'ai souligné aux autorités l'importance vitale de l'intégration des principes des droits humains dans tous les projets de développement, et les ai encouragées à inviter le Rapporteur spécial sur le logement convenable à se rendre au Tchad, car cela produirait des recommandations utiles sur les normes internationales relatives aux droits de l'homme qui devrait s'appliquer aux projets de défrichement et de réinstallation. Je me réjouis du dialogue en cours entre les autorités tchadiennes et les organisations de la société civile, et j'espère qu'elle sera renforcée et soutenue.

L'engagement du Haut-Commissariat au Tchad comprend également une collaboration avec la société civile et j'invite les organisations de la société civile à travailler en étroite collaboration avec notre Conseiller aux droits de l'homme. J'encourage également les organisations de la société civile à soutenir le gouvernement et le HCDH dans le renforcement du système tchadien protection des droits de l’homme.

Les difficultés rencontrées par le Tchad depuis de nombreuses années sont sévères, mais elles ne sont pas insurmontables. Le gouvernement a une tâche difficile dans l'amélioration de la situation des droits humains dans le pays et mes discussions des deux derniers jours m'ont convaincue de leur volonté politique de le faire. Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme se tient prêt à aider de quelque façon que nous puissions.

Merci.

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